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Place Tahrir, souk de la révolution

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[Marché du monde 1/6] . Au Caire, on peut s’habiller «printemps arabe».
publié le 13 août 2011 à 0h00

Il y a six mois, Dante y aurait planté son «Enfer». Un cercle bordé de façades fatiguées et disparates, piquées d’enseignes de fast-food, de cabinets médicaux, aux fenêtres toujours fermées pour fuir le vacarme incessant des dizaines de milliers de véhicules embarqués sur ce tétanisant rond-point. Le traverser à pied ? Une pulsion suicidaire. Puis la révolution est passée. Et Tahrir est devenue le nombril du «printemps arabe». Depuis la chute de Moubarak le 11 février, la place s’est aussi transformée en marché informel, éphémère et mouvant, qui renaît les jours de mobilisation, et disparaît avec le désenchantement de la foule. Comme une gigantesque foire, Fête de l’Huma sans bière ni merguez, mais où affluent les vendeurs ambulants.

Au départ du raïs, il n’a fallu que quelques jours à l’Egypte pour découvrir le potentiel marketing de sa fronde populaire. La panoplie du parfait révolutionnaire de salon s’achète place Tahrir. Ceux qui n’ont pas pu, voulu, ou osé descendre dans la rue s’y rendent comme en pèlerinage, pour s’équiper. Premier accessoire imparable, le drapeau noir-blanc-rouge, frappé de son aigle doré, décliné en toutes tailles, jusqu’au modèle XXL, qui pourrait orner sans rougir l’entrée de Kheops. Les couleurs nationales sont partout : sur les rubans imprimés au kilomètre, que l’on noue autour du poignet. Sur les petites cartes plastifiées frappées des photos des martyrs de la révolution, à suspendre au rétroviseur. Les autocollants. Sur les trousses, les paquet