Le 64e festival de Locarno avait commencé dans une langueur vaguement mondaine : une nuit d'orage, Abel Ferrara jouait de la guitare sèche dans une trattoria. Il s'est achevé samedi dans la fièvre d'un incident diplomatique : le producteur portugais Paolo Branco, président du jury, déclarant lors de la conférence de presse post-palmarès, avoir trouvé «fasciste»Vol spécial, docu suisse de Fernand Melgar sur la reconduite à la frontière des demandeurs d'asile. Stupéfaction helvétique, Fernand Melgar étant le documentariste qui monte. Melgar déclarait samedi soir vouloir attaquer Branco pour diffamation.
Mais sans doute paie-t-il là l'ambivalence de son approche : Melgar a l'habitude de poser sa caméra dans des centres de détention administrative, et d'y souligner les rapports qui se nouent entre flics humanistes, se vivant pour ainsi dire comme des travailleurs sociaux, et hommes et femmes voyant leur rêve d'un refuge en Suisse s'effondrer. Vol spécial capte-t-il la complexité d'une situation où l'humain reste tapi là malgré tout, ou bien montre-t-il le cynisme d'une administration qui expulse en toute politesse ? Dans son emportement, Branco se souvient sans doute des documentaires de Depardon (Urgences, par exemple) où il suffit d'un choix de cadre pour protéger le film de tout soupçon de démagogie.
Invisibles. Cela étant, on aurait préféré que le jury que Branco présidait se montrât tout aussi radical dans son ch