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Libération

Minute papillon

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publié le 3 décembre 2011 à 0h00

Octobre était là. Tiède. Doux. Jour parfait où je poursuivais de mon appareil photo l’écureuil du moulin. La flamme se fit follette d’un érable au noyer. De celui-ci, il s’élança vers le saule d’une espèce rieuse, et c’est à cet instant que j’aperçus sa petite tête mangée par ses yeux noisette, rondes pépites, le chef surmonté d’un duvet poilu. Tapie derrière le tronc, elle me dévorait par-dessus une branche. Etait-ce sa fille, sa toute nouvelle fiancée ? Juvénile cependant était son minois d’où me parvenaient les tressautements de son cœur.

Je vis alors, haut dans le ciel, deux compagnons au long cours : un couple de cigognes qui cerclèrent un moment la vallée à la recherche d’un abri pour la nuit. Mon appareil, quel handicap, étant en mode zoom, je loupais magistralement leur passage quand la couleur de leur bec me fut visible.

Aussitôt, il y eut un bruit dans mon dos, appuyé qu’il était contre une voiture. Sur le capot, un insecte semblait ramer, armé de deux pagaies sous sa carapace ailée. J’enquête encore, car alors il se laissa choir dans l’herbe où je le suivis un instant, jusqu’à ce que sur mon nez, six pattes gracieuses vinrent se poser. J’arrêtais de respirer et cette apnée ne me fut pas désagréable, l’animal, conciliant, m’éventant de ses deux ailes admirables, où se dessinaient quatre rubans plus oranges que la plus heureuse des maltaises, sur fond d’encre, de-ci de-là piquetées de poudre blanche. Aussi, de minuscules traces myosotis disposées telles les lèvres du