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Libération
TRIBUNE

De la protection du livre

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par Héloïse d'Ormesson, Sylvie Goutte-Baron, Francis Goux, Jean-Yves Masson, Régis Pecheyran et Yannick Poirier
publié le 27 décembre 2011 à 0h00

«Tout ce que j'ai donné à mon front de blonds parfums, en couronnes odorantes, tout cela sur le champ fut sans vie - tout ce qui est entré dans ma bouche et mon ventre ingrat, tout cela s'est perdu, et pour demain il n'en reste rien ; ce que j'ai confié à mes oreilles et à mon esprit, seul me demeure encore.» Callimaque (v. 305 - v. 240 av. J.-C.).

La filière livre française est orgueilleuse. Orgueilleuse de posséder sans doute l’un des plus beaux réseaux du monde. Situation que nous envient de nombreux pays voisins en Europe et ailleurs.

Tout est pensé et construit dans son histoire. Cinq cents ans d’intelligences et de complicités combatives mais positives entre la filière livre - de l’auteur au libraire -, les différents pouvoirs en place et la nation. Par une sagesse profonde, cette nation, attentive à son bien propre, a constamment œuvré pour donner au livre - donc à tout ce qu’il transporte, accueille et propose en partage au lecteur - plus de liberté.

Mais cette liberté est d’une rare fragilité. Que peut opposer le texte, dans la simple beauté d’une langue, aux conflagrations telluriques des mondes en action ? Rien. Ce rien est le résidu, le petit, l’infime. L’auteur lui donne sa vie, l’éditeur sa chance, et le libraire le propose en partage aux lecteurs. Le développement de la lecture à travers mille et une manifestations littéraires sur l’ensemble du territoire n’a eu de cesse de montrer que le livre, contrairement aux idées reçues, n’était pas un produit onér