Elle fume, elle boit, elle stresse, elle mange du tartare de cheval, «le régime de toutes les danseuses», dit-elle avec son sourire désarmant de franchise. La seule fois où Lisbeth Gruwez, Belge flamande, a vraiment fait attention à son alimentation, c'était à l'école bruxelloise de la chorégraphe Anne Teresa De Keersmaeker. Le midi, à la cantine, elle mangeait macrobiotique. Malheureusement, le soir, chez elle, elle cuisinait. Résultat : elle avait terriblement grossi. Ce qui ne semble pas dans sa nature, forte mais plutôt mince. Non qu'elle soit nerveuse, mais elle semble constamment sur le qui-vive, perfectionniste et en connexion avec le monde.
Enfant, elle a trop d'énergie, ce qui pousse sa mère à l'inscrire aux cours de danse. L'internat à l'Institut de ballet d'Anvers lui apprend l'indépendance et le lien communautaire. Chacune des étudiantes est affectée à une tâche déterminée : elle s'occupe du coucher des plus jeunes. Elle se dégagera sans difficulté de cet univers trop restreint pour son appétit de découverte. Elle feindra une maladie. Mais aujourd'hui, elle reconnaît que ces années passées à l'école de la discipline l'ont aidée. «Ce qui me reste, dit-elle, de ma formation au ballet classique, dès l'âge de 6 ans, c'est le souci des lignes, leur clarté dans l'espace.»
Les chorégraphes (Jan Lauwers, Sidi Larbi Cherkaoui, Wim Vandekeybus) qui ont fait appel à elle ne se sont pas trompés. C'est une interprète hors du commun qui n'a jamais connu le chôm