Un jeune se tue sur une route brumeuse de province, et c'est une fille. Un dimanche vers 4 heures du matin, avec ses trois copines, Gaëlle rentre de boîte. Le type qu'elle a aimé était dans la boîte. Jadis, dit-il plus tard, «je l'ai baisée, ce n'était ni bien ni mal, c'était sympa.» Il s'est marié avec une autre, mais cette nuit-là il lui court après, la rate, lui laisse un message. Elle écoute le message et la voiture sort de la route. Sur la petite scène étroite et longue du Cloître Saint-Louis, les débris de l'accident sont dispersés à terre, une terre épaisse et sombre à l'odeur âcre, comme dans les manèges. En province, on achève bien les chevaux, surtout quand ils sont jeunes. Il suffit d'attendre qu'ils galopent dans la nuit.
Christophe Honoré a écrit ce texte pour les élèves de la Comédie de Saint-Etienne (1). Ils ont l'âge de leurs personnages. Trois parties : «l'Accident», «Des morceaux du présent, du passé», «le Rituel, le retour des fantômes». La première est la plus dure, la plus complaisante aussi. Une rescapée cherche les autres, part chercher des secours. Une autre pique une crise de nerf. La troisième craint de se faire engueuler par ses parents si elle ne retrouve pas ses clés. Blessée au sexe, elle s'évanouit. Dans le coma elle aperçoit Gaëlle, dont seul un bras reste visible. Gaëlle est morte. On ne la verra qu'à l'état fantôme, manchote puis reconstituée par les fantasmes des autres.
Deux garçons tombent sur la voiture