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Interview

Philippe Coulangeon : «La crise n’est pas sans incidence sur le culturel»

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Le sociologue Philippe Coulangeon met en perspective évolution des pratiques et conjoncture économique :
publié le 14 septembre 2012 à 22h06

Sociologue et directeur de recherche au CNRS (1), Philippe Coulangeon s’est intéressé à la démocratisation de l’accès aux arts et à la distribution sociale des pratiques culturelles.

La baisse de la consommation de certains produits culturels est-elle le signe d’une crise ou d’une mutation de pratiques ?

Il y a sans doute plusieurs explications. Mais il faut distinguer le conjoncturel et le structurel. Il y a une évolution structurelle relative au basculement vers le numérique, qui n'est pas exclusivement liée à la conjoncture économique et affecte depuis cinq ou dix ans certains biens culturels, notamment chez les plus jeunes. Mais il ne faut quand même pas négliger les aspects les plus trivialement économiques des politiques culturelles. Si on regarde le budget de consommation des ménages depuis une trentaine d'années, on peut constater une diminution des postes liés à la culture. Il y a donc une dimension économique qui est loin d'être négligeable. Une société en crise, traversée par les inégalités, n'est pas sans incidence sur le secteur culturel. Le poids des dépenses contraintes [alimentation, logement… ndlr] pèse de plus en plus sur les ménages les plus modestes. Une dimension qu'on aurait tort d'ignorer. Si on ne va pas à l'Opéra, ce n'est pas qu'en raison de la pression de l'intimidation culturelle.

Une culture de l’écran est-elle donc en train de s’imposer ?

Depuis le début des années 70, les enquêtes du ministère de la Culture sur les pratiques culturelles des Français montraient une augmentation du temps consacré à la télévision. La dernière enquête a, pour la première fois, souligné une inversion de tendance liée aux jeunes générations