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Libération
Critique

Chili, démons et des mots

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Théâtre. Guillermo Calderón monte un diptyque aux Abbesses.
publié le 12 octobre 2012 à 19h03

Au Chili, le spectacle est joué dans les lieux même où l'on pratiquait la torture sous la dictature de Pinochet. A l'entracte, le public est invité à s'y promener. Villa + Discurso, pièce en deux parties imaginée par Guillermo Calderón, a pourtant suffisamment de qualités propres pour se passer de cette mise en condition. Sur le thème, si souvent rebattu par les metteurs en scène et les cinéastes chiliens, du passé qui ne passe pas, Calderón a imaginé un diptyque drôle et gonflé, interprété par trois jeunes comédiennes impressionnantes de conviction (Francisca Lewin, Macarena Zamudio, Carla Romero).

Villa, la première pièce, est une discussion de plus d'une heure entre trois jeunes femmes chargées de déterminer l'avenir de la Villa Grimaldi. Cette propriété des environs de Santiago fut l'un des principaux centres de torture de la dictature militaire. Après la passation du pouvoir aux civils, l'armée décida de raser le bâtiment. Sur le terrain à l'abandon, les survivants ont édifié un mémorial. Dans la pièce, les femmes doivent décider s'il convient de rebâtir la demeure à l'identique, ou d'édifier un musée à la place. La controverse les oppose violemment, le vote à bulletins secrets sur les propositions envenimant la dispute au lieu de l'apaiser.

On se passionne pour ces échanges à la fois politiques et intimes, car ils en disent long sur l’histoire du Chili et sont remarquablement agencés, avec des coups de théâtre, des renversements d’alliance, des ambiguït