«Refaire la Renaissance.» C'était il y a tout juste 80 ans. Après une décennie d'ébranlement général symbolisé par le krach de 1929, Emmanuel Mounier lançait la revue Esprit, fort d'un diagnostic - «une crise de civilisation» - et d'une culture de l'action et de la responsabilité - «le personnalisme». A la lecture de Charles Péguy, ce philosophe chrétien et combattant s'opposait à la fois à l'individualisme libéral et au collectivisme étatique. Mounier tentait d'ouvrir un espace intellectuel et politique «pour une pensée en situation».
Huit décennies plus tard, les animateurs de la revue, Olivier Mongin et Marc-Olivier Padis, jouent de cet effet de correspondance avec une époque tout aussi profondément troublée. Dans un numéro anniversaire, ils en appellent à une «imagination transformatrice» pour répondre «à cette peur de l'impuissance collective» qui mine à nouveau nos démocraties. Dans le droit fil d'une revue qui a toujours cru au lien fondamental entre les questions culturelles, sociales et politiques, Esprit interroge, sous de multiples facettes, le «projet culturel de l'éducation».
Et d’abord sous l’angle des «humanités» et de l’apparente désaffection pour les disciplines classiques : près de 10% d’étudiants en moins depuis 2004, pour les lettres, la philosophie, les langues anciennes et même les langues vivantes. Dans certaines universités, des départements ferment, faute d’inscrits.
Mais ce recul est paradoxal : en droit, en