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Libération
Critique

Leurres du danger

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Un ouvrage tout en trompe-l’œil retrace l’aventure du camouflage militaire, lancé en 1915.
publié le 21 décembre 2012 à 20h37

On en rirait franchement si l'épisode n'avait pas coûté la vie à plusieurs millions de soldats, hachés par la mitraille ou décimés par les maladies durant les quatre années de la Première Guerre mondiale. Mais Tromper l'ennemi présente un aspect méconnu de cette hécatombe : la naissance du camouflage moderne.

Pendant des siècles, les batailles se faisaient en effet en ordre et au grand jour : tuniques rouges contre uniformes bleus, casques à plumes contre étendards sanglants, et panaches blancs pour rallier les troupes au plus fort des combats. Puis vinrent 14-18 et ses tranchées. La guerre s’enterre, les uniformes virent au kaki, au marron ou au bleu horizon. Le salut passe désormais par l’invisibilité pour éviter les tirs des snipers ou surprendre l’ennemi dans un conflit encore «artisanal» - il n’existe ni radars ni détecteurs d’aucune sorte. Dès 1915, les premières unités spécialisées dans le camouflage voient le jour avec des soldats… artistes dans le civil.

C'est l'objet de l'ouvrage de Cécile Coutin, conservatrice en chef à la BNF, département des Arts du spectacle, qui nous fait découvrir leurs étonnantes réalisations à travers plus de 300 documents rares ou inédits. Faux arbres creux d'observation, buissons portatifs, cabanes et abris camouflés, brouillards artificiels, armées de mannequins, canons ou chars factices. La liste est longue et l'inventivité des poilus et de leurs états-majors sans limites, telle cette invraisemblable reconstitution en carton-pâte