Par temps de débandade de tous les référents marchands en matière de musique à vendre sur support matériel (LP, singles, EP, CD, vinyle, DAT, K7), la compilation discographique éclairée, le coffret enrichi, archaïsmes longtemps dévolus au solde, à la carambouille de fond de catalogues, acquièrent un statut exemplaire de «valeurs refuges», riches, en pleine panique, de plus-values patrimoniale, visuelle, érudite, élitiste. Là, le design et l'érudition cryptique, ludique, ont encore cours. Témoin le disque-objet joujou spécifiquement et maniaquement créé pour Noël par Sufjan Stevens, totalement chrétien, totalement pédé ou pas, totalement perché. Silver & Gold, cinq EP et albums de Noël (2006-2010), garanti sans répétition, rogaton, remix - même s'il s'agit une fois sur deux d'hymnes méthodistes ou de reprises (dont Prince et Schubert). Avec sa gueule d'innocent pervers sous gapette de base-ball, Stevens, 37 ans, est le pin-up boy de Jésus, saint à sauver tous les cyniques.
Licornes. En 2006, Songs for Christmas, autre coffret quintuple, était nettement plus sage, conforme à la guirlande et au renne empapaouté. Cette fois, c'est folle à plumes de paon et sermon synthétique. Quoique dispo sur plateforme, Silver & Gold vaut en 3D son pesant de carton : graphique entre japanime, Traumanale et Sesame Street, la boîte dégueule de stickers pop et décalcomanies goths à licornes roses, divins enfants démons et wonderwomen exo