Tandis que les acteurs se chauffent la voix dans le fond, il s'impatiente, seul au milieu du décor, mordillant ses branches de lunettes. Bras arqués et pieds qui traînent, tel un danseur emprunté, il rejoint sa table de travail, face au plateau : «Je déteste être en retard.» A quelques jours de Noël, dans la salle Gabily du Théâtre national de Bretagne (TNB), à Rennes, Jean-François Sivadier dirige les répétitions du Misanthrope. Le spectacle doit être créé au TNB ce 8 janvier, avant de partir pour une longue tournée, qui doit passer notamment par l'Odéon à Paris aux mois de mai et juin. Au menu de cet après-midi, l'acte III, avec notamment la grande scène entre Célimène et Arsinoé. Du metteur en scène, par ailleurs féru de musique et d'opéra, pas de grands discours sur la psychologie des personnages, mais des interruptions fréquentes, qui portent sur le rythme, l'intonation, les articulations : «Le truc important, c'est "cependant"» ; «Là, c'est le "mais" qui compte.» Ou des références à d'autres personnages de fiction : «C'est comme Nina et Arkadine» ou «comme Merteuil et Valmont».
Nora Krief et Christelle Tual, qui interprètent Célimène et Arsinoé, ne sont pas exactement de petites natures. La première est une des fidèles de Sivadier, la seconde une nouvelle venue dans la famille dont le noyau dur est ensemble depuis plus de vingt ans, c'est-à-dire l'époque du groupe T'Chan'G que dirigeait Didier-Georges Gabily, dispar