Que peut-dire aujourd’hui un sociologue de Marseille 2013, capitale culturelle de l’Europe ? Il est beaucoup trop tôt pour prononcer des jugements définitifs au vu des impressions contrastées qu’ont suscitées les deux journées d’inauguration. D’un côté, les professionnels de la culture soulignent les limites artistiques de l’opération, y voyant une manifestation de provincialisme là où l’on aurait attendu l’émergence d’un projet vraiment distinctif. C’est le sens du bref et incisif reportage de Gilles Renault dans Libération du 14 janvier. Marseille n’est pas Lille, on le savait déjà. D’un autre côté, le public marseillais a semblé adhérer sans réserve à la manifestation, par son nombre d’abord, dans une ville où la sphère publique s’est progressivement délitée sous l’effet des divisions de l’espace urbain, de la transformation des modes de vie des classes moyennes et du succès des idéologies racistes; par sa bonne humeur ensuite, qui mettait en suspens les puissantes tensions qui caractérisent aujourd’hui l’espace social marseillais. Je livrerai ici quelques observations rapides, qui n’ont d’autre prétention d’esquisser un possible cadre d’analyse.
Autour du Vieux-Port, le public vraiment divers par sa composition sociale et générationnelle, retrouvait, presque surpris, les rites de la promenade vespérale, éprouvant, quelquefois avec maladresse, la nécessité de l’attention à l’autre, en vue d’éviter les bousculades ou une chute dans le port. La délicatesse était aussi frappa