SAMEDI
Peigné en arrière
Je quitte Paris pour Royan comme tous les mois et demi à peu près. Dans le TGV, une voix douce annonce la présence d'un défibrillateur cardiaque à bord du convoi. Moi, ce qui me fait mal au cœur, c'est que plus personne (ou presque) ne lit plus dans le train. Je suis plongé dans le nouveau roman d'Alan Hollinghurst, l'auteur trop rare de The Swimming-Pool Library (1988). Je débarque encore hanté par le souvenir du portrait du poète Rupert Brooke au profil sublime, accroché au mur du vestibule, à Lamb House, la maison de Henry James, à Rye. «Alors, en vacances ?» me crie la voisine au caniche blanc. Oui, si l'on veut. Même pas le temps d'apercevoir l'océan avec les courses urgentes à faire et le coiffeur qui me peigne en arrière, ce qui n'était plus arrivé depuis dix ans. Mais tout va bien. Le ciel est du bleu intense que vénérait Gustave Courbet, lequel le comparait à celui de la Grèce.
DIMANCHE
God save my queen
En juin 1953, la jeune reine Elizabeth d'Angleterre était couronnée. Enfant, je feuilletais longuement l'album-souvenir à couverture rouge et or publié par Paris Match. Pour moi, cette reine était comme un personnage de conte de fées. Son pays devait être un royaume enchanté. Ce que je découvrais de Londres, en couleurs et sur papier glacé, en témoignait. A l'intérieur, Buckingham Palace devait ressembler au palais de Dame Tartine. Longtemps après, je suis toujours aussi infatué d'elle. J'admire son flegme et son humour digne de Jerome K. Jerome. Je me suis laissé di