Est-ce que tu te sens proche de gens comme la Monte Young, Phil Glass ?
(Il se tire les cheveux en l'air, doucement, à pleines mains, et répond en avalant les mots.) Je les aime bien, mais pour faire ce genre de musique, il faut savoir exactement ce que tu veux, te plier à une discipline… que moi, je n'arrive pas à supporter. Je me sens moins précisément situé, défini. Et puis, je crois qu'il passe plus d'émotion dans ce que je fais. Ce n'est pas tout à fait de la musique hypnotique. C'est plutôt comme une combinaison d'influences, d'éléments différents… Si on reste ensemble [les musiciens et moi], c'est qu'on a à peu près la même notion de la chose. Même si on n'est pas d'accord sur certains points de détail. […] Tiens, les gens crient ! (De fait, des clameurs montent, sourdes et sombres, au-dessus de nous, dans la salle de concerts). Pourquoi crient-ils ? (Longue pause. Sur la bande, rien que des hurlements.)
Est-ce que tu imagines pouvoir t’arrêter un jour de chercher le «son», de chercher ta musique ?
De produire des sons parfaits ? De composer ? Oui, je pourrais m’arrêter. Il y aura toujours des gens, d’autres gens, qui composeront de la musique, des sons qui seront considérés comme «parfaits». Parfois, certains atteignent un niveau que je redoute de ne jamais pouvoir toucher. Erik Satie et sa musique au piano, qui a tant influencé les mentalités… Khatchatourian aussi. Ce qu’il a écrit pour le violoncelle, pour les cordes… Le violoncelle a, en soi, un son parfait.
C’est un peu frustrant, parfois, de t’apercevoir que tu t’acharnes à travailler dans un studio et qu’il n’y a que des junkies autour de toi