Nul n'est prophète en son pays. L'Américain Sean Murphy en a fait l'expérience en voyant deux de ses comics mieux traités en France qu'aux Etats-Unis. En publiant en simultanée dans une parution soignée sa première œuvre indépendante, Off Road, et son dernier graphic novel, Punk Rock Jesus, les éditions Urban Comics permettent de voir le chemin, tant personnel qu'artistique, parcouru en une dizaine d'années par cette figure montante du comics indé.
Secoué par le tour que prend la campagne pour la réélection de George W. Bush en 2003, l'idée d'une BD d'anticipation pointant la dérive de la religion aux Etats-Unis s'esquisse dans l'esprit de Murphy. D'autant que ce «fervent catholique» vient lui-même de rejeter sa foi. Mais, incapable de formaliser les choses, Sean Murphy suit les conseils d'un ami scénariste et laisse décanter le récit qui deviendra, dix années plus tard, Punk Rock Jesus.
Il se recentre alors sur Off Road, l'histoire plus simple et autobiographique d'une virée avortée entre copains, après que leur jeep s'est retrouvée noyée au milieu d'un étang. La sortie estivale tourne à la foire d'empoigne et les trois potes de lycées, incapables de s'extirper de là, finissent par régler de vieux différends. Le noir et blanc, clair, est assuré mais assez immature, Murphy lorgnant du côté du manga. Ce style cartoony et nimbé de lumière permet de contrebalancer la noirceur d