Libération célèbre ses 40 ans, et personne à sa naissance n'aurait parié un centime sur une telle longévité. Là se trouve l'élément objectif incontestable qui mérite qu'on s'y attarde comme sur un événement historique. De ceux qui s'inscrivent dans le temps. Libération est entré dans l'histoire, au moins celle des médias et du journalisme.
Commençons par un paradoxe. En 1973, Libération balbutiant se fonde sur un credo primordial : reconquérir la liberté de la presse en France. En ce début des années 70, le président Pompidou dispose d'un ministère de l'Information, occupé par le zélé Alain Peyrefitte. Très efficace dans sa manière forcenée de surveiller l'expression en général, il exerce son «droit» à la censure en expédiant au tribunal les déviants de tous poils. Quarante ans plus tard, on peine à imaginer l'existence d'une telle police de la parole médiatique. Aujourd'hui, la liberté de la presse est pleine et entière, même si elle reste encadrée par des lois qui la contraignent à observer un minimum de respect de l'individu. C'est qu'en quarante ans, l'ergonomie des médias a été totalement bouleversée par de nouvelles technologies qui ont entraîné à leur tour une révolution dans la manière de délivrer et d'accéder à l'information. Sauf exceptions qui confirment la règle démocratique, tout peut se dire, s'écrire, se filmer, se photographier, bref s'exprimer sans encourir les foudres de la justice. De la censure de jadis, nous voilà entré