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Libération
Chronique «Ecritures»

C’est où, Internet ?

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Tout est allé si vite, en vingt ans, qu’il me semble que nos inconscients sont en retard sur la machine : nous ne parvenons pas à penser le phénomène, nous le subissons sans le symboliser assez.
publié le 27 décembre 2013 à 20h56

Je me sers sans cesse d’Internet. Et Internet se sert de moi. Je constate, comme tout le monde, qu’il suffit que j’achète un objet en ligne pour qu’on me le repropose en mieux durant des semaines. Que Google me localise quelle que soit ma position sur la planète. Qu’il ne sert à rien d’effacer un mail de mon ordinateur si je ne l’efface pas sur le serveur (où de toute façon, sa trace est conservée). En résumé, que mes penchants, mes mœurs, ma classe sociale, ma situation familiale et mes opinions sont stockés «quelque part» hors de mon contrôle. C’est où, Internet ?

En décembre, j'ai signé une pétition contre la surveillance sur Internet. Cette pétition, signée par 500 écrivains, dont plusieurs Prix Nobel, a été lancée par cinq écrivains de langue allemande, dont la bien nommée Eva Menasse. Ils demandent aux gouvernements de légiférer. Se référant à Edward Snowden, ils rappellent que «quelques clics de souris suffisent à l'Etat pour accéder à votre portable, à votre boîte mail, à vos comptes sur les réseaux sociaux et à vos recherches sur Internet». Nous avons peut-être une confiance excessive en nos démocraties, puisque, si elles basculent, tout est en place pour une surveillance de masse.

L'effet et, sans doute, l'angoisse sont accentués par le fait que nous portons nos smartphones comme des bioprothèses, et que le jour n'est pas l