Montrer du doigt l'immoralité des traders est devenu si à la mode qu'il est presque impossible de faire la moindre réflexion originale à ce propos. C'est pourquoi le Loup de Wall Street étonne. Certes, il n'y est pas question de dénonciation mais de confession, celle de Jordan Belfort supercourtier repenti des années 90 auquel Leonardo DiCaprio prête son corps.
La grande spécialité de Jordan Belfort est de savoir faire naître des désirs chez ses clients milliardaires. Non pas des désirs de marchandises, ni d’argent sonnant et trébuchant. Ce que ce personnage fait désirer, ce sont des choses beaucoup plus abstraites dont la seule fonction est d’être cumulée. Plus ces choses sont désincarnées et fantasmatiques, plus elles sont puissantes. Sans compter la jouissance que provoque, chez cette minorité de superprivilégiés, le risque de les perdre ou d’en gagner encore plus. Martin Scorsese nous montre ainsi que les riches escroqués par des traders sont victimes de leurs propres désirs immoraux et dégénérés. Or, la confession de Jordan Belfort dévoile un autre aspect de cette critique chic des traders. Le fait de gagner tant d’argent si facilement suscite chez ce jeune homme un malaise qui se transforme aussitôt en une volonté d’autodestruction. L’alcool, les drogues, les fêtes insensées lui permettent de tenir le coup certes mais aussi de se punir par le fait de ne pas s’être enrichi en travaillant, en faisant des efforts. D’être devenu un voleur de riches non pas pour les