«Idon't care what my teachers say, I'm gonna be a supermodel», chantait Jill Sobule en 1995 sur la BO de Clueless. Chanson irrésistible, à la bêtise revendiquée, emblématique de son temps. Dans les années 90 régnaient les supermodels. Ces filles qui, pendant dix ans, en plus de monopoliser l'attention sur les podiums, s'assuraient une retraite confortable en posant pour des marques de cosmétiques ou de sodas.
A quoi reconnaît-on un supermodel ? A sa silhouette sportive et conquérante. Interrogé par Tita von Hardenberg et Hannes Rossacher pour le documentaire l'Ere des supermodels, le couturier Wolfgang Joop s'extasie sur «le corps idéal de guerrière […] à la poitrine exceptionnelle» de Naomi Campbell. A son prénom exotique, irrémédiablement associé à sa personne. Et à ses histoires d'amour avec les grands noms de l'époque : Richard Gere pour Cindy, David Copperfield pour Claudia, la moitié de Hollywood pour Naomi…
«Croco». Cette oligarchie doit beaucoup au photographe allemand Peter Lindbergh. A la fin des années 80, Alexander Liberman, alors directeur des éditions Condé Nast, lui commande une série mode. Mais Lindbergh lui avoue «ne pas savoir quoi faire de l'image de la femme du Vogue américain». «Il s'agissait d'une personnalité de la haute société vivant dans un grand appartement et qui portait des sacs en croco», explique-t-il à la caméra d'Arte.
Lindbergh veut trancher avec l'exubérance des