Un repas, trois intermèdes, et rien. Les personnages de la nouvelle pièce d'Ahmed El Attar, le Dernier Dîner, présentée à Marseille ce vendredi et samedi, sont transparents : futilité, autoritarisme, allusions maladives à l'argent et mépris pour le peuple - comparé à un tas de cafards -, les caractérisent. Ahmed El Attar dresse un portrait cinglant de l'élite économique égyptienne, celle-là même qui investit depuis plus d'une décennie les villes du désert, en périphérie de la capitale, et qui, par instinct de classe, préfère l'ordre au désordre.
Malaise. Dans une salle de théâtre située à quelques encablures de la place Tahrir au Caire, seul le grincement des planches rompt le silence gêné des spectateurs. Devant le public, se joue un dîner familial ordinaire, ponctué de minidrames, de manœuvres de séduction, de sursauts de colère contre la bonne - elle aussi égyptienne. Le malaise est palpable parmi ceux qui se reconnaissent dans les personnages : avec justesse, Ahmed El Attar renvoie la nukhba (élite en arabe) à ses limites. En premier lieu, son décalage avec la société et son incapacité à penser l'intérêt général.
«La vague, ça ne durera que deux ou trois mois et tout reviendra comme avant… en mieux même», prédit le personnage surnommé le «général», avec l'arrogance de celui qui sait que l'avenir lui donnera raison. Difficile de ne pas voir, derrière cette «vague», la révolution qui a mis fin à la présidence