Deux femmes sont actuellement à l'honneur à la galerie Lelong, à Paris, dans le VIIIe arrondissement. Dans l'espace librairie d'une part, où l'on (re)découvre les œuvres sur papier de l'artiste franco-américaine, Louise Bourgeois (1911-2010). En particulier des gravures réalisées dans les années 40, qui avaient déjà été exposées par la galerie en 1990, en passant par ses «Autobiographical Series» de 1994, qui représentent des autoportraits, des miroirs, ainsi que des salles de bains.
«Grand large». Par ailleurs, au premier étage, sont présentées pour la première fois les œuvres de l'écrivain et peintre libanaise Etel Adnan, née en 1925, dont sa dernière série. Cette native de Beyrouth vit à Paris, après avoir longtemps résidé en Californie, où elle a enseigné la philosophie et commencé à peindre. La galerie expose ses petits tableaux, telles des pages de livres, mais aux horizons très vastes et aux couleurs acidulées. «Une respiration. Le grand large», affirme Jean Frémon, cofondateur de la galerie Lelong (1), dans le catalogue.
Etel Adnan peint des paysages de montagnes, notamment le mont Tamalpais, près de San Francisco, sacré pour les Indiens, qu'elle voyait depuis la fenêtre de sa maison de Sausalito, dont la présence habite encore profondément son esprit et dont elle a fait de nombreuses représentations. «Il est devenu mon jardin. Pour Cézanne, la Sainte-Victoire n'était plus une montagne. C'était un absolu. C'était de la peinture», écrivait-elle en 1986, dans son livre Voyage au mont Tamalpais.
Puzzle. Ses petites toiles, comme des fenêtres ouvertes sur l'extérieur, composées de différentes formes géométriques qui se superposent, s'emboîtent comme des pièces de puzzle ou se dressent vers le ciel. Le plus souvent, rouges, jaunes, bleues, vertes, traitées en aplats. On peut voir dans ces compositions des partitions musicales et poétiques creusées, dans le sillon d'un Paul Klee notamment. A côté de ses paysages minimalistes à la limite de l'abstraction (sa Californie) sont également exposés des dessins plus anciens, à l'encre de Chine et sur papier, de paysages plus urbains (pont, héminée, gratte-ciel…), mais aussi des natures mortes, ainsi que ses délicats leporellos, aussi appelés livres accordéons. Une façon de ne pas oublier son côté littéraire, puisqu'elle est tout autant peintre, poète et écrivain.
(1) Galerie Lelong, catalogue bilingue français-anglais, textes de Jean Frémon, Hans-Ulrich Obrist et Cole Swensen, 2015, 66 pp., 20 €.