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Jeu vidéo

«Cities Skylines», ville était une fois…

Le successeur à «Sim City» que les bâtisseurs virtuels attendaient.
Capture d'écran de «Cities Skylines», développé par le studio finlandais Colossal Order. (Photo DR)
publié le 9 avril 2015 à 18h06

D’abord l’éolienne. Il faut toujours commencer par l’éolienne. C’est propre et, même si ça fait un peu de bruit, c’est l’assurance d’un développement durable pour cette ville en devenir. On l’imagine écolo, florissante et éduquée. Certes, il faut déjà commencer par une concession d’ampleur : définir une zone industrielle qui assurera l’amorçage en termes d’emplois. Forcément, ça va polluer. Mais on la met en place loin des logements, pour gêner le moins possible les habitants. Du coup, il faut des routes pour acheminer tout le monde… Ça ne va pas être simple.

C'est justement pour ça qu'on est là, hypnotisé par le défi de Cities Skylines. Jongler avec les besoins, se débrouiller avec les finances et tenter, malgré tout, de ne pas trop s'éloigner de notre idée de ville idéale. C'est sans doute le plus compliqué. Après la huitième éolienne, il faut se rendre à l'évidence, la croissance de la ville demande plus d'énergie. Un poil honteux, il faut se résigner à poser une centrale au charbon. Promis, dès qu'on pourra, on la remplacera par un barrage hydraulique.

Cities Skylines est un peu le messie dans l'univers des «city builders», ces simulations qui permettent de faire surgir une ville dans toute sa complexité. C'est surtout un soulagement pour tous les amateurs d'urbanisme ludique. En 2013, on avait en effet fondé beaucoup d'espoir dans la cinquième mouture de Sim City. L'héritier direct de celui qui a imposé le genre ne pouvait pas décevoir. Mais, après quelques heures de jeu, le verdict était sans appel. Villes très limitées en taille, connexion obligatoire à Internet, multijoueur presque imposé, gameplay qui tombe dans le simplisme, il ne restait plus grand-chose de cette expérience unique qui consiste à passer des heures à admirer les bâtiments qui poussent.

Contrôle. Créé en 1989 par Will Wright, le premier Sim City avait pris le monde du jeu vidéo à contre-pied : pas d'objectif précis (et donc pas de fin), pas d'action, juste des zones à définir, des transports à mettre en place, et des dizaines de paramètres à gérer en temps réel pour assurer le bon fonctionnement des infrastructures. Et, surtout, il fallait créer et non détruire. Le succès mondial fut d'autant plus inattendu. Les suites, Sim City 2000 (1993), Sim City 3000 (1999) et surtout Sim City 4 (2003) poussèrent le concept encore plus loin, en améliorant l'aspect graphique et en travaillant toujours plus l'interface de gestion pour que le joueur garde cette impression grisante de contrôle total. Puis, pendant une décennie, plus rien. Jusqu'au douloureux fiasco.

Quelques titres ont bien tenté d'occuper le terrain, comme ceux de la série des Cities XL, éditée par le français Focus, mais jamais avec le même brio que l'original. Cities Skylines n'était donc pas particulièrement attendu, même si le studio finlandais Colossal Order avait commencé à faire ses preuves avec deux Cities in Motion, sortis en 2011 et 2013, où il fallait gérer les transports dans plusieurs grandes villes. Et il suffit de quelques dizaines de minutes pour s'en rendre compte, Cities Skylines est le Sim City 5 que tout le monde attendait.

Déchets. Il y a d'abord cette prise en main immédiate qui permet de jongler très vite avec plusieurs dizaines de paramètres. La pollution, l'éducation, les loisirs, l'emploi, les impôts, les commerces, la circulation, l'accès à l'eau, les soins ou la gestion des déchets, tout est accessible en deux ou trois clics grâce à une interface quasi parfaite (on a juste galéré pour supprimer une ligne de bus un poil loufoque). Même la conception de voies de circulation aériennes est d'une simplicité enfantine. On retrouve alors très vite ses vieux réflexes, ceux qui consistent à penser l'occupation des sols à l'avance, à prévoir des espaces vides que viendront remplir les futurs bâtiments indispensables comme la caserne des pompiers et l'école primaire, ou encore à anticiper l'augmentation des besoins primaires que sont l'eau et l'électricité. Et surtout, on admire cette ville vivante qui s'étend de plus en plus.

Cities Skylines se permet même d'innover, avec quelques nouveaux paramètres bienvenus, comme la définition de quartiers qui permettent de mettre en place des politiques locales différentes (légalisation des drogues douces, spécialisations industrielles, etc.), ou encore l'importance du courant de la rivière pour la gestion des eaux usées.

Surtout, avec un terrain de jeu qui peut aller jusqu'à 36 km2, on ne se sent plus limité en termes d'expansion. Allez, par ici, un nouveau quartier résidentiel, par là, un centre d'affaires flambant neuf. Et puis, il serait peut-être temps d'y penser, à ce grand barrage. Plutôt en amont des eaux usées, si possible.