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Libération
Décryptage

50 Cent joue la ruine pour garder ses dollars

Le rappeur a rempli, au début de la semaine, une demande de mise en faillite personnelle. Ce qui ressemble bien à une manœuvre d'homme d'affaires accompli.
Curtis Jackson, dit «50 Cent», en mai 2006 au festival de Cannes. (Photo Mario Anzuoni. Reuters)
publié le 16 juillet 2015 à 14h37

En mai, le magazine Forbes publiait les «Forbes Five», son classement des cinq artistes hip-hop les plus riches. Le rappeur 50 Cent y figurait en quatrième place, avec une fortune estimée à 155 millions de dollars (environ 142 millions d'euros). «Bien qu'il soit l'un des rappeurs qui a le plus réussi dans les dix dernières années, 50 Cent doit la plupart de sa fortune non pas à sa musique mais aux 100 millions de dollars que lui a rapporté la vente [à Coca Cola, ndlr] de Vitamin Water en 2007», écrivait alors le journal économique.

Boisson sucrée, donc, mais aussi vodka, sous-vêtements, casques audio, eau de cologne, ligne de baskets… Le rappeur, qui est aussi acteur (21 films, au succès variable) et producteur, a pris soin d'investir dans différents secteurs. En juin, le New York Times lui tirait le portrait, vantant ses «exceptionnels instincts d'entrepreneur». A peine un mois plus tard, le 13 juillet, Curtis James Jackson III de son vrai nom, a pourtant déposé dans le Connecticut une demande de mise en faillite personnelle. Il y estime ses dettes à entre 10 et 50 millions de dollars.

«Les intérêts commerciaux de M. Jackson vont poursuivre leur cours normal sans être affectés par cette demande durant toute la durée de son traitement et [50 Cent peut] continuer son travail d'artiste, pendant qu'il organise une restructuration ordonnée de ses affaires financières», a expliqué son avocat, William A. Brewer III, cité par Business Insider. Comme l'a relevé le Hollywood Reporter, Curtis Jackson a déposé une demande dite «chapitre 11» qui lui permet de réorganiser ses affaires, contrairement à une demande de type «7» qui aurait mené à la liquidation de tous ses actifs, y compris familiaux.

 «Les temps sont durs»

50 Cent est-il pour autant ruiné ? Doit-il vendre sa maison de 21 chambres et 25 salles de bains ? Pire, ne pourra-t-il plus racheter un iPhone aussitôt qu'il l'aura écrasé contre la porte de sa Rolls ? Probablement pas. Il a eu beau plaisanter, en postant mardi sur Instagram une photo de lui devant une Smart, légendée «les temps sont durs, MDR», le rappeur aux 22 millions d'albums vendus est un homme d'affaires aguerri.

Il l'a d'ailleurs clairement expliqué dans une interview à E ! News, repérée par 20minutes.fr : «Je prends les précautions que prendrait n'importe quel autre bon businessman. […] Walt Disney a déclaré faillite. Donald Trump aussi [en fait, a corrigé un journaliste de Forbes, Trump a mis plusieurs de ses entreprises en faillite mais ne s'est jamais déclaré en faillite personnelle, ndlr]. Cela veut dire que vous réorganisez votre argent, et ça permet d'empêcher des choses que vous ne voulez pas voir arriver. J'ai une bonne équipe de conseillers juridiques.»

Parmi ces «choses que vous ne voulez pas voir arriver» figure sans doute le règlement, ordonné par un tribunal, de 5 millions de dollars (4,5 millions d'euros) à Lastonia Leviston, l'ex-compagne du rappeur Rick Ross, pour avoir diffusé une sex-tape d'elle, 50 Cent voulant ainsi attaquer son rival.Le 13 juillet, alors que Curtis Jackson devait présenter au tribunal qui jugeait cette affaire un relevé de ses possessions, il s'est contenté d'apporter la demande de mise en faillite, qui permet de geler ce versement conséquent. Et, selon des témoins, a demandé à emprunter un cinquante cents pour se payer un café… La drôlerie, ou l'arrogance, de la scène, rapportée par des journaux américains, n'a rien à envier à la série Power, qui raconte la double vie d'un patron de boîte de nuit/baron de la drogue, dans laquelle il apparaît, et dont la deuxième saison est sortie en juin.

 Homme d’affaires comme un autre

Mais ce jugement n'est probablement pas la seule raison pour 50 Cent de recourir à une mise en faillite, relève le site Vulture. «Plusieurs de ses entreprises ont à l'évidence mal tourné : il doit, selon un jugement du tribunal, 17 millions à une compagnie audio après un désaccord à propos d'une affaire de casques. Son business de promotion de combats de boxe a été mis en faillite plus tôt cette année. [Dans d'autres de ses affaires], les ventes ne sont plus ce qu'elles étaient», écrit la journaliste.

«[Sa demande] signifie probablement que ses actifs ne sont pas liquides, que les vendre rapidement pourrait sérieusement abaisser leur valeur et qu'il a besoin de temps pour amasser assez de cash pour payer ce qu'il doit. Un administrateur va regarder toutes ses affaires et s'assurer que cela arrive, et Jackson ne s'est pas soustrait à ses obligations légales de payer en remplissant cette demande [de mise en faillite]», explique-t-elle encore. Harnaché de conseillers en tout genre, le rappeur est juste devenu un homme d'affaires comme un autre, jouant une sorte de partie d'échecs – sur un plateau de 60 carats, si possible. Et se veut à l'image de son sixième album, attendu pour cet automne, Street King Immortal («l'immortel roi de la rue»).