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Libération
théâtre gore

«Horror», garanti sang pour sang

Présentée à la Villette dans le cadre du festival 100%, la pièce de Jakop Ahlbom recrée l’atmosphère des films d’horreur, sous la forme d’un hommage appuyé.

«Horror», de Jakop Ahlbom. (Photo Sanne Peper)
Publié le 31/03/2016 à 18h25

Lancé depuis une semaine à Paris, le festival 100% bat son plein à la Villette jusqu’au 10 avril. Colonne vertébrale de l’événement, une expo d’art contemporain quadrille le parc, de l’incontournable Grande Halle au Wip, bâtiment oublié dans l’ombre de la Cité des sciences. En parallèle, 100% égrène une série de spectacles qui, mêlant théâtre, cirque, danse et performance, auraient pour point commun de n’en avoir aucun, chaque proposition se caractérisant, grosso modo, par l’ambition de ne rien s’interdire.

C'est dans cet ensemble ouvert à tout vent que s'inscrit l'Horror de Jakop Ahlbom qui, loin de se poser en chef d'oeuvre, pourra au moins briguer sans peine le statut d'authentique curiosité. Toujours à l'affiche à Paris, deux pièces, la Rivière (Comédie des Champs-Elysées) et la Dame blanche (théâtre du Palais-Royal), tentent d'instaurer sur scène un climat d'angoisse. De l'épouvante à l'effroi, il n'y a qu'un pas que cherche à franchir cet Horror, dont les six lettres du titre suffisent à formuler la note d'intention - pour le coup aussi courte qu'explicite. Histoire sans parole (ce qui règle la question des surtitres, la troupe étant néerlandaise), la trame a pour cadre une demeure isolée dans laquelle débarquent deux hommes et une femme. De la chair à slasher, devine-t-on, tant l'atmosphère vire illico au cauchemar, à travers une succession de phénomènes inquiétants et d'apparitions sinistres annonçant que le pire reste à venir.

Divertissant exercice de style, Horror rend ainsi hommage au genre cinématographique dont, chemin faisant, on s'amusera à lister les emprunts (clins d'oeil ou références), de The Grudge à Paranormal Activity via Darkness ou la Maison du diable. Autant le fond ne parvient jamais à franchir le cap du pastiche, autant la forme, elle, mérite une certaine bienveillance, tant l'équipe - où l'on accordera ici autant de mérite aux techniciens qu'aux acteurs - ne chôme pas pour, sur un tempo rapide, enchainer les tableaux gorgés de trucages soumis ici aux contraintes du spectacle vivant (un comble, soit dit en passant, pour un tel empilage de macchabées!): bande-son archétypale surlignant le mystère morbide, main coupée (qui continue de galoper!), giclées de sang, pugilats «chorégraphiés», éviscération, objets qui valdinguent… Rien n'est omis dans cet inventaire de l'effroi que le metteur en scène Jakop Ahlbom (qui signe une création tous les deux ans depuis 2000) argumente comme suit : «Dans mon travail, j'essaie de franchir les frontières du réel et de créer un monde subconscient. Cela me permet de montrer une perspective différente, une autre identité, et de révéler ce qui se cache en nous tous.»

«Horror», de Jakop Ahlbom, Grande Halle de la Villette, 75019. Jusqu'au 3 avril.