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Libération
A la télé ce soir

L'histoire des tabloïds : portrait trashé

Arte retrace ce soir la légende de cette presse sensationnaliste. Un journalisme sans limite qui amènera aux plus grands scandales.

. (Photo Arte)
Publié le 24/07/2016 à 19h54

On devait déjà à Jean-Baptiste Péretié, l'excellent documentaire sur la Revanche des geeksqui racontait joyeusement comment des souffre-douleurs à lunettes vivant dans un monde de Comics et de code informatique avaient fini par dominer le monde. Cette fois, et toujours pour Arte, il retrace – tout aussi joyeusement – l'histoire des tabloïds. La légende de cette presse jouant sur le plaisir, le dégoût et nos instincts commence – comme elle finira – avec Rupert Murdoch d'abord en Australie puis à Londres, quand le magnat de la presse rachète News of the Word et le Sun pour y imposer son modèle nourri d'une armée de petites mains journalistes éclusant les pubs à la recherche du moindre ragot.

«Ce qui plaisait, c’était notre manque d’éthique»

Au-delà de la sacro-sainte pin-up de la page 3 du Sun, il est intéressant de voir comment ces journaux se sont placés délibérément du côté des jeunes et des petites gens, contre l'establishment et les intellos. Avec un mantra revendiqué : si la une est marrante, le journal ne se vendra pas plus mais les lecteurs reviendront le lendemain.

L'empire Murdoch débarque ensuite aux Etats-Unis avec le rachat du New York Post. Là encore, pas de faux-semblants, comme le raconte un ancien du journal : «Ce qui plaisait c'était notre manque d'éthique. Nous, on voulait juste raconter une bonne histoire». Et qu'est-ce qu'une bonne histoire selon un tabloïd? «Juste une histoire dont on sait que le lecteur va la raconter lui-même par la suite.» C'est l'époque où ces journaux se vendent par palettes, l'époque des titres incroyables, d'histoires parfois survendues mais parfois vraies. C'est l'époque où Bild surclasse les plus trashs des journaux anglais en affichant sa pin-up en une et allant jusqu'à publier une photo du Prince Charles nu.

Il faut écouter l'incroyable Kelvin MacKenzie, célèbre rédacteur en chef du Sun, dont on disait que les faits n'étaient pas toujours à la hauteur de son imagination, il faut entendre comment il raconte son travail, avec humour et sans fausse pudeur. Par exemple, comme quand ils ont mené campagne contre l'Europe version Delors en 1990 : «Emmerder les Français c'était marrant, mais ils ne répondaient pas beaucoup. Sinon, s'ils nous avaient recouverts de seaux de merde, ç'aurait été génial.»

L’histoire des tabloïds se recoupe avec celles de plus grands scandales : les premières infidélités de Bill Clinton avec Gennifer Flowers; le procès O.J Simpson, qui incita les journaux dits sérieux à s’aventurer sur ces terres people; la mort de Lady Di, évidemment, qui marqua la fin de la période dorée : des ventes en chute, la concurrence d’Internet et de nouvelles petites princesses trash qui ne valaient pas les anciennes.

Le coup de grâce viendra de l'affaire des écoutes du News of The World en Angleterre, qui provoquera la fermeture de ce symbole du journalisme décomplexé. Mais rassurez-vous, il reste bien des moyens d'assouvir nos penchants voyeurs et exhibitionnistes.

Tabloïds ! Splendeur et décadence de la presse à scandale, ce dimanche soir sur Arte à 22h15