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Zyed et Bouna, Zemmour... Ces titres que W9 aurait pu censurer

La chaîne du groupe M6 a décidé ce lundi de flouter le tee-shirt du rappeur Black M en soutien à Adama Traoré, dans un souci de «neutralité». «Libération» vous propose une sélection de quatre autres chansons que W9 aurait dû, à ce compte, retirer de sa playlist.

Capture d'écran du clip de Black M (Capture d'écran)
Publié le 19/09/2016 à 20h20, mis à jour le 20/09/2016 à 11h40

W9, chaîne du groupe M6, a diffusé cette semaine le clip du rappeur Black M, Je suis chez moi. Problème : les équipes de la chaîne ont décidé de flouter l'un des tee-shirts que portait le rappeur du groupe Sexion d'Assaut. En cause, un message blanc sur noir inscrit sur le tissu : «Justice pour Adama. Sans justice, vous n'aurez jamais la paix», en référence à Adama Traoré, un jeune homme décédé le 19 juillet dernier après une interpellation policière. Après de nombreuses accusations de censure sur les réseaux sociaux, les responsables ont tenté de se justifier dans la foulée, brandissant l'argument de la «neutralité» dans une affaire encore «non jugée».

Pourtant, dans l’histoire du rap, de nombreux artistes ont revendiqué leur soutien aux protagonistes de certaines affaires dont le procès était encore en cours. Pour vous, et pour le programmateur des prochains clips diffusés sur W9, voici une sélection des morceaux qui ont traité d’une affaire pas encore jugée.

Kery James, Akhenaton, Diams, Kool Shen - «Morts pour rien»

Fin octobre 2005, deux jeunes ados, Zyed Benna et Bouna Traoré, meurent à Clichy-sous-Bois après avoir voulu échapper à un contrôle de police. Dans les jours qui suivent, les banlieues françaises s'embrasent. Si le procès s'est terminé en mai 2015 – soit dix ans plus tard – avec la relaxe des deux policiers, un collectif de rappeur publie un album en hommage aux deux jeunes par la voix de l'association Au-delà des mots dès le mois de janvier 2007. De grands noms du rap dont Akhenaton, Diam's ou Kool Shen y participent, et clament «on veut savoir ce qu'il s'est passé». L'un d'eux, Kery James, exprime d'ailleurs de nouveau sa colère dans un titre en 2015 intitulé du nom des deux adolescents.

 Youssoupha - «Menaces de mort»

En mars 2009, Eric Zemmour porte plainte contre le rappeur Youssoupha pour injure et diffamation après la diffusion sur Internet de la chanson A force de dire sur son album intitulé les Chemins du retour. Les paroles incriminées étaient : «A force de juger nos gueules, les gens le savent qu'à la télé souvent les chroniqueurs diabolisent les banlieusards, chaque fois que ça pète on dit que c'est nous, je mets un billet sur la tête de celui qui fera taire ce con d'Eric Zemmour.»

La même année, dans son clip l'Effet papillon, Youssoupha revient sur son procès avec le polémiste. «Eh ouais j'ai changé, et je le montre/ Désormais j'écris mes textes engagés dans le journal le Monde /Retiens mon nom d'analphabète, tu veux que je faiblisse/ Si j't'ai traité de con, bah considère que c'est un euphémisme.» L'occasion d'en remettre une couche et de faire référence à sa tribune dans le Monde du 18 avril 2009, intitulée «Ces artistes fantômes que sont les rappeurs français» pour répondre aux attaques par médias interposés du chroniqueur et éditorialiste Eric Zemmour.

Dans son clip Menace de mort (2011), le rappeur revient sur les nombreux procès qui ont précédé le sien. De quoi retracer une vingtaine d'années de procès (Passi, NTM, La Rumeur, Orelsan…) entre rappeurs, institutions et personnalités publiques. Le 28 juin 2012, Youssoupha est jugé «non coupable» par la cour d'appel de Paris.

Le Bavar ft. La Rumeur - «Tellement»

En juillet 2002, le ministre de l'Intérieur de l'époque, Nicolas Sarkozy, porte plainte pour «diffamation, atteinte à l'honneur et la considération de la police nationale» contre Hamé du groupe La Rumeur, non pas pour une chanson mais pour un article publié dans un fanzine qui accompagne la sortie de leur album l'Ombre sur la mesure. Le rappeur écrivait alors : «Des centaines d'entre nous sont tombés sous les balles de la police.»

En 2009, un an avant la décision de la Cour de cassation, le groupe de rap balance pourtant une pique sulfureuse à l'ex-ministre de l'Intérieur devenu président dans le morceau Tellement en featuring avec Bavar : «Avec des "si" j'foutrai la tour Eiffel dans l'cul du Président.» Après huit ans de procédure, cinq procès, un en première instance, deux en appel, et deux pourvois en Cassation, la Cour de cassation a finalement donné raison à Hamé, rappeur du groupe La Rumeur, contre l'ex-ministre de l'Intérieur.

Nekfeu - «Medley»

Le 12 février 2016, sur la scène des Victoires de la musique, le rappeur des groupes 1995 et S-Crew livre une performance medley de ses titres phares. En fin de son morceau, il remplace l'une de ses punchlines par «Prenez Marine Le Pen et libérez Moussa». L'artiste fait référence à Moussa Ibn Yacoub, un humanitaire français à l'époque toujours détenu au Bangladesh. L'homme est, depuis, rentré en France, mais la performance du rappeur demeure.