Sur scène, Tatiana est absente. Evidemment, puisque depuis près de trente ans, plus personne n’a vu Tatiana. Elle avait 17 ans quand elle a disparu, un dimanche soir de septembre, en 1995, à la gare de Perpignan. Elle fait partie de celles que les journaux ont appelées «les disparues de Perpignan» (Disney + a récemment annoncé la création d’une série sur l’affaire), quatre jeunes femmes enlevées à leurs familles entre 1995 et 2005. Les corps de trois d’entre elles ont été retrouvés, et leurs meurtriers condamnés. Pas celui de Tatiana.
Quand sa sœur a disparu, Julien Andujar avait 11 ans. Il a pensé son spectacle, où il est seul sur scène et son frère Alex à la régie son, comme une «cérémonie» qui ne serait pas triste. Et comment ce spectacle pourrait-il l’être quand Andujar, monté sur talons et coiffé de cheveux synthétiques rouges, accueille les spectateurs un à un, en leur proposant un bout de tortilla ? Ou quand il imite sa prof d’anglais qui affublait ses élèves de prénoms british et l’accueillait en classe : «Gordon ? Toujours pas de nouvelles de Tatiana ?» (mais pourquoi Gordon ? se demande encore Andujar).