Le muscle du cou saillant, la tête légèrement penchée, elle a un petit sourire en coin qui semble dire : «Approchez, regardez de plus près, je suis encore bien pour mon âge, n’est-ce pas ?» La Lady in Black (2022) du sculpteur américain Marc Sijan exhibe son corps athlétique, en sous-vêtements noirs, au beau milieu de l’exposition «Hyper Sensible» à Nantes. Dans ce parcours d’œuvres hyperréalistes, pour la plupart récentes, la dame aux cheveux gris – de vrais cheveux naturels –, aimante le regard avec les innombrables détails de son corps âgé et sculptural. Ventre plat, jambes fines, taille de guêpe, port de reine, elle a néanmoins les attributs de la vieillesse, peau relâchée à certains endroits, veines bleues, mains noueuses et rides autour des seins et de la bouche.
La «dame en noir», qui n’a ni conversation, ni odeur, ni mouvement, est néanmoins fascinante. Tout d’abord parce qu’il est rare d’observer de si près la sculpture d’une femme de cet âge (on lui donne environ 65 ans). Ensuite parce que «l’effet miroir» fonctionne à plein régime avec ce corps invisibilisé, et reproduit ici à taille humaine. Chaque visiteur et visiteuse jouent alors au jeu des comparaisons : est-ce que je lui ressemble, suis-je plus vieille, serai-je aussi belle à son âge ou même, serai-je encore vivante ? Voilà le type d’émoi que procure une sculpture hyperréaliste : un plaisir coupable flirtant avec le voyeurisme et le goût du kitsch. Peut-on vraiment aimer ces clones humains, devant lesq