Que peuvent bien se raconter un mini homme-lion, un totem de coquilles de noix et de vieilles semelles de chaussure aux yeux écarquillés ? Dans le silence de l’atelier d’Ossip Zadkine, juste à côté du jardin du Luxembourg, on imagine parfaitement le dialogue qu’entament à la nuit tombée les œuvres de la lumineuse exposition l’Ame primitive. En plein jour, les dessins, sculptures, collages et peintures, tous complices, se répondent en silence, puisant dans le primitivisme une sensibilité commune. Plusieurs écueils se présentaient pourtant aux deux commissaires, Jeanne Brun, ex-directrice du musée Zadkine, actuellement directrice du développement culturel de la BNF, et Claire Le Restif, directrice du centre d’art contemporain d’Ivry-le-Crédac : comment associer des œuvres modernes et contemporaines avec le primitivisme, une notion suspecte à l’heure des perspectives décoloniales ?
Rencontre
Il faut chercher le fil conducteur du parcours dans l’histoire d’Ossip Zadkine, originaire de Russie, et son goût pour l’anti-académisme. Valorisant l’artisanat, admirateur des peintres d’enseignes de son pays natal, Zadkine a toujours puisé son souffle créateur dans le travail manuel et dans les tréfonds de l’âme russe. Dans son ancienne maison de la rue d’Assas, à Paris, ravissant lieu d’exposition où se déploie l’Ame primitive, ses sculptures témoignent d’un attachement au bois et à la terre, d’une passion pour la nature et pour ses matériaux, nés pendant son enfance en Russie. Emigré