Au seuil de l’exposition, la vision de deux têtes grises et brillantes, en aluminium, se levant sur un sol liquide, du même métal pourtant, glace et attendrit à la fois. L’une a les yeux verts et grand ouverts, perdus dans le vague où elle semble entrevoir quelque chose d’effrayant. L’autre, à peine humaine (trop boudinée et schématique) est greffée d’un masque de plongée qui lui donne des airs de cyclope ahuri. Ce curieux duo féminin, baroque, avec son gras modelé, et puis surnaturel avec ses éclats métalliques, a son double, symétriquement posé devant l’autre entrée de Lafayette Anticipations. Entre ces deux sculptures spectaculaires de Jean-Marie Appriou, dans le hall, une plantation d’espèces végétales se fait faussement décorative. Cette installation florale de Marguerite Humeau n’est pas là pour embellir l’espace, mais elle aussi, pour y glisser la présence d’un corps. Car les plantes soigneusement choisies l’ont été pour leurs vertus médicinales. Les unes soignent les infections pulmonaires, les autres, le foie, d’autres encore agissent sur la circulation sanguine. C’est donc un corps souffreteux et encombré, mais curable par les pouvoirs de la nature, que l’artiste plante au rez-de-chaussée de cette exposition en duo composée en chœur par Humeau et Appriou, tout en faisant œuvre chacun de leur côté, en la tramant de lignes narratives communes, en se situant à la même altitude ou en frémissant des mêmes inquiétudes et des mêmes espoirs.
Mauvaises herbes
L’altitude ? C’est celle du sol