«Et là, contre toute attente, ils meurent tous.» La voilà partie d’un grand éclat de rire, commentant l’image finale de sa gigantesque fresque peinte, River of No Return. On aurait dû s’en douter : malgré leur délicatesse, malgré la douce séduction qui émane des couleurs un peu passées et du tulle des jupes des filles, les histoires de l’artiste Sylvie Selig finissent mal, en général. On aurait dû s’en douter car elle avait laissé des indices : les dégoulinades de peinture à huile n’annonçaient rien de bon, les visages vides, sans traits ni reliefs n’étaient pas de bon augure non plus. Quant à ce gibet où pendent loups et crapauds…
Sylvie Selig a travaillé trois ans sur River of No Return et c’est la première fois qu’elle peut voir son œuvre de bout en bout : cette toile de 140 m de long et de 2m20 de haut, qui serpente d’un bout à l’autre, aller et retour, de l’immense salle du Musée d’art contemporain (MAC) de Lyon, était bien trop grande pour qu’elle puisse l’embrasser du regard dans son atelier du XVIIIe arrondissement parisien. Sylvie Selig a 83 ans et c’est aussi la première exposition qui lui est consacrée dans un musée. «Un bouleversement, après tant d’années», dit-elle.
Dans les salles du MAC, les membres de sa Weird Family, sculptures-assemblages de bric et de broc, posent crânement, avec leurs collerettes à feuilles et à plumes, leurs parures d’os, leurs têtes en papier mâché surmontées de cornes. Et plus belles et intrigantes enco