Il y a cent cinquante ans, Monet, de la fenêtre de son hôtel sur le port du Havre, peint ce qu’il voit : «Du soleil dans la buée et au premier plan quelques mâts de navires pointant…» Deux années plus tard, Edmond Renoir, frère d’Auguste et journaliste chargé du livret de la première exposition de ceux qu’on appellera bientôt les impressionnistes, le questionne sur le titre : «Ça ne pouvait vraiment pas passer pour une vue du Havre», se souvient Monet, qui répond, simplement : «Mettez “impression”.» Edmond complétera par «soleil levant».
La question du moment précis où fut peint le tableau est restée longtemps en suspens avant d’être tranchée très récemment à la suite d’une enquête minutieuse mêlant analyse topographique, calculs astronomiques, hydrographiques et observations météorologiques concernant l’état du ciel et de la mer mais aussi le sens du vent (influant sur le panache de fumée s’élevant dans le ciel). C’est donc vraisemblablement le 13 novembre 1872 aux alentours de 7h35 du matin que Monet compose l’œuvre manifeste de l’impressionnisme, mouvement et groupe amalgamant peintres désireux de prendre l’air – ouvrir grand les fenêtres de l’Académie, du Salon, de l’atelier et s’en échapper, faire l’expérience du paysage, éprouver le vent, le soleil, la brume, et tenter de saisir la lumière, en capter les nuances, reflets et s