Pour cette exposition «Juifs d’Orient, une histoire plurimillénaire», le choix du lieu – l’Institut du monde arabe (IMA) à Paris – est déjà en soi un message fort, aussi politique que culturel. Ce qui est montré permet, en effet, de réamarrer à cette partie de la planète un héritage oublié, une histoire en voie d’engloutissement. Après avoir raconté l‘épopée souvent tragique des chrétiens d’Orient dans une exposition qui, en 2017, fit date, l’IMA, présidée par l’ancien ministre Jack Lang, narre, cette fois-ci, l’odyssée douloureuse des communautés juives, l’autre minorité qui compta dans ce monde qui s’étendit, jusqu’à la fin du Moyen Age, de l’Andalousie aux confins de l’Iran et jusqu’au Yémen.
Entretien avec Benjamin Stora
Au fil des siècles, la pensée et la culture juives se sont, en effet, épanouies à Bagdad, au Caire, à Alexandrie, à Cordoue, à Fès, à Safed, au cœur souvent du monde arabo-musulman. C’était avant les désastres contemporains. De 1 million il y a une centaine d’années, les communautés juives orientales se sont désormais réduites comme peau de chagrin, comptant à peine quelque 30 000 personnes, principalement en Turquie. «Le XXe siècle fut celui des tragédies. Mais il ne faut pas regarder cette histoire à partir de la fin», plaide l’historien Denis Char