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Exposition

L’artiste Pierrick Sorin au Musée d’art de Nantes : game of clones

Cosmonaute, patineur sur savon, nettoyeur de peinture… L’artiste vidéaste investit le Musée d’art de Nantes avec ses alter ego burlesques et attachants dans des dispositifs optiques bluffants.
«Peindre et nettoyer» (2024), de Pierrick Sorin. (Pierrick Sorin)
publié le 7 mai 2024 à 5h36

On fait tous des efforts pour être présentables. Même Pierrick Sorin essaye de se montrer sous son meilleur jour, de «Faire bonne(s) figure(s)», pour sa première grande exposition au Musée d’art de Nantes, sa ville natale. Pourtant, le naturel revient au galop… A travers une vingtaine d’œuvres, son petit alter ego apparaît toujours aussi maladroit, colérique, angoissé, ridicule, clownesque et… très sympathique ! A 63 ans, le vidéaste poursuit son travail d’illusionniste à travers des autofilmages burlesques, des installations et des dispositifs à effets holographiques, sortes de théâtres optiques de poche, entre bijou technologique et artisanat. Dans le patio du musée nantais, une bande délurée de miniclones de Pierrick Sorin est lâchée…

Machine à visualiser les rêves

En robe de chambre rose, tel un Sisyphe de salle de bain, il y en a un qui court sur un tourne-disque (Vélocité matinale, 2014), un autre qui bulle dans un aquarium en combinaison de plongée (Chorégraphie aquatique, 2017) et un troisième qui patine sur un savon tel Buster Keaton (Chorégraphie aux savonnettes, 2014). Un autre mini Sorin s’allonge dans une drôle de machine à visualiser les rêves, vilain appareil qui lui renvoie des cauchemars à la gueule, sur un écran. Plus loin, dans une installation vidéo grandeur nature, c’est un nouvel alter ego, en cosmonaute, qui marche sur la Lune. Dans la chapelle de l’Oratoire, tous ces gais lurons participent au Balai mécanique, une installation monumentale, avec guitares, cymbales et balais à chiottes qui font de la musique.

«En général, je joue un personnage extérieur à moi-même, dans lequel je me reconnais en partie», explique l’artiste, formé aux Beaux-Arts de Nantes. Mais pour la première fois, Pierrick Sorin admet que l’œuvre monumentale qui ouvre l’expo parle de lui. «Là, je montre quelqu’un en difficulté qui essaye de peindre. Pour une fois, c’est moi-même.» Dans Peindre et nettoyer ou la volonté à l’œuvre (2024), derrière trois immenses vitres, l’artiste fait les carreaux, avec un pschitt et de la mousse, comme sur une grande toile. Le dispositif est bluffant. Puis l’artiste s’essaye aussi à la peinture et efface tout, comme sur les ardoises magiques.

Dégoulinures

Etre ou ne pas être peintre ? La mise en échec de la peinture, on la retrouve dans Dommage à Buren, une drôle d’œuvre un peu moqueuse, mix de tableau et de vidéo, avec des dégoulinures hors des célèbres bandes rigoureuses de Buren. Plutôt que d’être peintre, Pierrick Sorin a choisi : il est la peinture. il est l’œuvre d’art. Dans le petit théâtre optique Pierrick transhistorik (2016), il surgit comme un fou furieux d’une toile. «Je suis un produit de l’histoire de l’art, n’est-ce pas ? Un peu comme Gilbert et George.» Le diable Pierrick Sorin est hors de sa boîte. C’est à Nantes que vous le trouverez.

Pierrick Sorin, «Faire bonne(s) figure(s)» au Musée d’art de Nantes. Jusqu’au 1er septembre