Menu
Libération
Disparition

Mort du peintre Pierre Soulages : fondu au noir

Article réservé aux abonnés
Figure la plus connue de l’art contemporain français, exposée dans le monde entier, le héraut du noir, qui modelait cette couleur depuis plus d’un demi-siècle, dialoguant inlassablement avec elle jusqu’à inventer l’«outrenoir», est mort ce mercredi. Il avait 102 ans.
Pierre Soulages dans son atelier parisien en 2013. (Stéphane Lavoué/Libération)
publié le 26 octobre 2022 à 15h52

Il avait fait du noir sa signature et, contre toute logique, un puits de lumière. Mieux, il en avait fait son interlocuteur privilégié. Soulages et le noir débattirent ensemble, plus d’un demi-siècle durant, sur toile et sur papier, présentant les résultats de leur controverse sur les cimaises du monde entier. Sans jamais en démordre, sans s’épuiser ni se lasser, sans cesser de s’étonner ni de s’émerveiller devant les possibilités offertes par une couleur qui n’est pas censée en être une, l’artiste a mis et remis le noir sur le grill du châssis. Au point qu’il lui fallut lui trouver un autre nom, forger un néologisme, «outrenoir» qui semble tenir aussi bien de l’exotique «outremer» que du funeste «outre-tombe». Même si l’artiste ne joua jamais sur la symbolique du noir, il y a dans l’obstination avec laquelle il en enduisit ses toiles, une sorte d’emphase dramatique et radical. L’artiste bouleversa ce que chacun croyait savoir du noir, de la peinture (abstraite) et de l’art, faisant basculer la peinture sur une pente aveugle et voyante : «Ce qui me guide et ce qui apparaît quand on regarde les toiles, disait-il, c’est la lumière reflétée par le noir, transformée par le noir.» Pierre Soulages s’est éteint à l’âge de 102 ans

A lire aussi, une rencontre du peintre avec «Libération» en 2013

Soulages fut un peintre moderne et populaire, présent partout dans le monde occidental (surtout à ses débuts, avant que New York ne vole l’art moderne aux Européens) et