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Patrimoine

Plusieurs musées français prévoient un tarif différencié pour les touristes extra-européens dès 2026

Versailles, Chambord ou l’opéra Garnier envisagent d’appliquer une tarification spéciale pour les visiteurs extérieurs à l’UE, à hauteur de 30 euros. Dans un contexte de coupes budgétaires du secteur de la culture, ce dispositif permettrait de financer des rénovations.
Dans la galerie des Glaces du château de Versailles, en 2023. (Serge Attal/Only France. AFP)
publié le 26 mai 2025 à 18h35

Après le Louvre, c’est au tour du château de Versailles, de l’un des monuments du Centre des monuments nationaux (CMN) – à savoir la Conciergerie ou l’Arc de triomphe –, du château de Chambord, mais aussi de l’opéra Garnier d’envisager la mise en place d’un tarif spécial de 30 euros pour les visiteurs extra-européens. Une expérimentation étendue donc à plusieurs musées, révèle le Monde ce lundi 26 mai, dont la mise en place est prévue pour le 1er janvier 2026.

Pour Cécilie de Saint-Venant, directrice générale déléguée au développement du château de Chambord, «ça vaut le coup de tenter». Interrogée par le Monde, elle explique que le château «a besoin de 100 millions d’euros pour des travaux sur dix ans, dont 25 millions d’euros sur l’aile François Ier, qu’on ne peut pas financer avec nos recettes à ce stade». Le monument, qui affiche un taux d’autofinancement de 105 %, compte ainsi proposer dès janvier 2026 un billet d’entrée à 29 euros pour les visiteurs non européens, contre 19 euros actuellement. Si à Versailles, les visiteurs non européens représentent 42 % des 8 millions des visiteurs annuels, ils sont 10 % parmi les 1,1 million d’entrées au château de Chambord.

Coupes budgétaires

Cette tarification différenciée permettait aux musées d’effectuer de nombreux travaux de rénovation et devrait s’étendre en 2027 à d’autres sites touristiques, sur fond de coupes budgétaires sévères au ministère de la Culture. La ministre Rachida Dati avait en effet annoncé, le 17 janvier, vouloir réaliser 50 millions d’économies supplémentaires en 2025, en plus de 100 millions déjà actés par le gouvernement Barnier.

Une réduction des aides qui tombe mal. Les deux scènes de l’opéra Garnier et de Bastille pourraient être contraintes de fermer temporairement dès 2027, en raison de la vétusté des lieux. C’est la conclusion de la Cour des comptes rendue publique en octobre, qui s’était penchée sur la situation de l’établissement entre 2015 et 2024. Elle pointe du doigt un «état de vieillissement avancé et la fatigue de nombreux équipements techniques due à une exploitation intense des lieux».

Grâce à cette tarification différenciée, le Louvre espère ainsi dégager 20 millions d’euros supplémentaires par an. Lesquels serviront à réaliser des travaux d’urgences estimés à plus de 400 millions d’euros sur quinze ans. Le 22 janvier, Laurence de Cars directrice du musée avait publié une lettre dans le Parisien, afin d’alerter sur la dégradation du musée, exacerbée par une surfréquentation.

Quelques jours plus tard, le 28 janvier, Emmanuel Macron s’était rendu au musée, où il avait déroulé tout un plan de sauvetage de l’institution. Il avait entre autres informé de la mise en place d’un billet supplémentaire, afin de pouvoir accéder à la Joconde. Le tableau aura en effet le droit à un nouvel «espace dédié», «probablement sous la cour carrée», a précisé sur France Inter la présidente du musée le 2 février. Le chef d’Etat avait également demandé à la ministre de la Culture de «préparer une tarification différenciée, plus élevée donc, pour les visiteurs étrangers venus de pays non-membres de l’Union européenne».

«Discriminatoire»

Toutefois, pour Alexis Fritche, secrétaire général de la CFDT culture, «une telle logique, fondée sur l’origine géographique, est discriminatoire et n’a pas sa place dans un service public culturel. Elle rompt avec les principes d’universalité, d’égalité et d’ouverture qui fondent nos institutions», condamne-t-il auprès du Monde. Pourtant, il existe déjà un tarif différencié selon la nationalité des visiteurs, notamment des étudiants européens de moins de 26 ans qui ne payent pas l’entrée des musées nationaux alors que les jeunes non européens payent le prix fort.

Valérie Baud, la représentante CFDT du Louvre s’inquiète quant à elle auprès du Monde de conditions de visite «toujours aussi dégradées» et regrette une augmentation des tarifs entrant en vigueur pour des millions de visiteurs alors même que «les travaux prochains réduiront les espaces ouverts au public sur l’aile Sully».