«Lorsque l’on se sent incapable d’écrire, on se sent exilé de soi-même», disait l’écrivain britannique Harold Pinter. C’est peut-être pour éviter cette aliénation que les artistes et intellectuels, durant la Seconde Guerre mondiale, ont continué de créer. Au musée de l’Armée, l’exposition «Un exil combattant. Les artistes et la France 1939-1945» leur rend hommage. Le parcours fait toutefois la part belle à plusieurs scientifiques et intellectuels engagés dans la Résistance, et foisonne de nombreuses archives et documents historiques s’écartant un peu de la promesse faite dans son titre.
Reste que les œuvres qui y sont exposées valent le détour : une version manuscrite du poème Liberté écrite par Paul Eluard, la reconstitution de la librairie new-yorkaise Gotham Books qui publiait des écrivains exilés, les archives des films de Jean Gabin – ainsi que sa tenue de soldat –, les œuvres sobres et figuratives de Jean Hélion… Nombre de ces artistes ont été contraints de se réfugier à Londres, New-York, Buenos Aires ou Brazzaville, s’imprégnant de ces nouvelles contrées, et créant un art baroque où se juxtaposent les images du passé et du présent. Ainsi, Fernand Léger, expatrié aux Etats-Unis, brosse un amoncellement de souvenirs sur sa toile les Plongeurs polychromes (1942-1946), où les calanques de Marseille se mêlent au bleu nacré des piscines américaines.