Ses œuvres en grisaille sont du même bois que le revers des triptyques, quand on replie un volet pour voir ce qu’il y a derrière, quand on contourne l’œuvre pour découvrir un mystère en noir et blanc. Passer de l’autre côté de la peinture officielle, détourner les grandes œuvres : souvent l’artiste béninois Roméo Mivekannin dessine son propre visage, qui toujours nous fixe, et s’immisce tout en haut du Radeau de La Méduse ou donne ses traits à Madeleine, le beau portrait d’une femme noire, ancienne esclave, peint par Marie-Guillemine Benoist.
On parlait de bois, mais les œuvres célèbres que Mivekannin reproduit et détourne s’imposent sur de vastes toiles de tissu, suspendues dans le Pavillon de verre du Louvre-Lens. Inviter un peintre qui revisite la peinture d’histoire dans la continuité de la Galerie du temps, qui vient d’être repensée à Lens, «c’est continuer d’écrire l’histoire», explique Annabelle Ténèze, la directrice du lieu.
Il y a une manière sculpturale dans ces toiles peintes à l’acrylique, pourtant planes et dépourvues de cadres. Peut-être parce que Roméo Mivekannin, qui vit aujourd’hui à Toulouse, a été formé à l’ébénisterie et à l’architecture avant de se consacrer à la peinture et à l’histoire de l’art. Ou bien parce que les ombres des corps qu’il dessine avec virtuosité