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Au musée de l’Orangerie, la collection prisée de Heinz Berggruen

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Picasso, Matisse, Klee : le musée parisien expose les œuvres majeures collectées par le fin galeriste allemand mort en 2007, où se lisent les tourments et les obsessions des peintres qu’il a côtoyés.
«La Minotauromachie», gravue de Picasso, 1935. (Ashmolean Museum of Art and Archaeology/Succession Picasso 2024)
publié le 14 décembre 2024 à 10h15

Picasso épelait mal son nom. Il y a dans la collection concentrée du marchand juif allemand Heinz Berggruen, mort en 2007 à 93 ans, une gravure de 1935, la Minotauromachie, dédicacée à «mon ami Bergrruen», avec deux «r» et non deux «g». Picasso écrit mal les mots, mais son orthographe des formes, elle, est assez parfaite pour qu’il dessine ou peigne tout ce qu’il veut, sous tension. La Minotauromachie est, selon l’historien de l’art Pierre Daix, mort en 2014, «sans doute la plus importante, en tout cas la plus complexe» de ses gravures. Ses fantasmes – ou ses craintes – y sont réunis à un moment qu’il qualifiera comme «la pire période de [sa] vie». Il est sur le point de se séparer d’Olga et sa nouvelle compagne, Marie-Thérèse Walter, est enceinte. Bientôt son atelier sera mis sous séquestre. Un an avant la guerre civile espagnole, c’est la guerre intime de l’Espagnol.

Un minotaure de belle taille est penché sur Marie-Thérèse. La jeune femme est un torero allongé sur un cheval éventré, seins à l’air. Le cheval paraît annoncer celui de Guernica. Une menace de viol plane dans l’air. Deux autres modèles allongés figurent dans l’exposition de l’Orangerie, non loin des ombres infiniment verticales de Giaco