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Aux oscars, Jada Pinkett Smith prise en étau entre blague sexiste et gifle viriliste

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L’affaire de la gifle des oscars révèle un sexisme au carré : celui de Chris Rock qui ne trouve rien de mieux à faire qu’une blague miteuse sur la maladie auto-immune d’une femme qui met en scène avec courage son alopécie. Et celui de Will Smith qui défend par la violence viriliste l’honneur bafoué de son épouse, comme au temps des chevaliers.

Will Smith et Jada Pinkett Smith sur le tapis rouge des Oscars à Los Angeles, dimanche. (MIKE BLAKE/REUTERS)
ParJohanna Luyssen
Cheffe de service - Société
Publié le 28/03/2022 à 13h37

C’est peu de dire que la séquence choc de la gifle des oscars met mal à l’aise. Le soufflet infligé par Will Smith à Chris Rock balaye tout sur son passage. Tout autre sujet, toute polémique, tout débat est depuis enseveli. Depuis le geste impulsif de l’acteur oscarisé, on se perd en commentaires sur la violence de la scène. Mais de quelle violence parle-t-on ?

Permettons-nous d’y voir tout d’abord – et il ne faudrait pas que le geste spectaculaire de Will Smith l’occulte – la violence d’une blague sexiste. Une de plus, sans doute. Mais pas sur n’importe quel sujet. L’alopécie est une maladie auto-immune qui se caractérise par une perte de cheveux. Or, on sait quelle symbolique sexuelle et féminine repose sur la chevelure des femmes. On sait que pour les punir à la Libération on les tondait. On sait à quel point les femmes atteintes de cancer font ce qu’elles peuvent pour compenser le dégarnissement causé par la chimio, entre perruques qui grattent et turbans couvrants. Bref, dans l’imaginaire collectif, et c’est encore le cas en 2022 – hélas –, une femme au crâne nu est rarement vue comme un parangon de féminité.

Jada Pinkett Smith est une femme noire de 50 ans. Ce n’est pas anodin d’écrire cela. L’alopécie touche particulièrement les Afro-Américaines,