Il était l’un des maîtres de la bande dessinée historique capable d’allier, avec un trait assez académique, le réalisme au dynamisme des péripéties qu’il faisait vivre à ses personnages. Le dessinateur français André Juillard, créateur des Sept Vies de l’Epervier et du Cahier bleu, est mort ce mercredi 31 juillet selon un communique transmit ce jeudi par son éditeur à l’AFP. «C’est avec une immense tristesse que nous apprenons la disparition d’André Juillard, survenue le 31 juillet, à l’âge de 76 ans», ont annoncé les éditions Dargaud dans un communiqué.

«Son élégance, sa simplicité, sa générosité et son sourire désarmant nous manqueront cruellement», ont-elles ajouté. Maintes fois primé, l’auteur a notamment travaillé sur le prochain tome de Blake et Mortimer, Signé Olrik, qui se déroule en Cornouailles britanniques et doit paraître, à titre posthume, en fin d’année. André Juillard avait déjà illustré plusieurs tomes de cette série à succès, crée en 1946 par Edgar P. Jacobs, comme La Machination Voronov (2000) ou le Testament de William S. (2016).

Né à Paris, ancien élève des Arts décoratifs, André Juillard a transcrit dans son œuvre son goût de l’Histoire, façonné dès son plus jeune âge quand il recopiait les illustrations des livres sur l’Antiquité ou le Moyen-Âge. De Bohémond de Saint Gilles en 1979 au Secret de la cathédrale en 1981, en passant Les Cathares en 1980 ou 2 000 ans d’histoire du Calvados en 1981, il a reconstitué la petite et la grande Histoire au fil des cases et des bulles. Et ce jusqu’à sa grande saga d’aventures à l’époque d’Henri IV, Les Sept vies de l’Epervier, sept albums sur scénarios de Patrick Cothias publiés de 1983 à 1991 chez Glénat, qui lui ont fait connaître le succès populaire.

Dessinateur d’histoires racontées par d’autres et chef de file de la BD historique, André Juillard a voulu aussi se lancer seul et offrir au public une histoire contemporaine : le Cahier bleu, publié en 1994 chez Casterman, qui reste, pour de nombreuses personnes, son chef-d’œuvre. Cette histoire d’amours croisés et de malentendus lui vaut de recevoir le prix du meilleur album français au Festival international de la bande dessinée d’Angoulême en 1995. L’année suivante, il reçoit le Grand Prix de la Ville d’Angoulême, récompense suprême décernée à un auteur pour l’ensemble de son œuvre. Les trois volumes de Léna, publiés chez Dargaud entre 2006 et 2020 ou encore la série Plume aux vents, chez le même éditeur (publiée de 1995 à 2002), mettant à nouveau en scène l’héroïne des Sept vies de l’Epervier sont également des albums qui ont laissé une trace importante dans l’histoire de la BD franco-belge.

Dessinateur compulsif, André Juillard a noirci des tonnes de carnets au fil des ans. Nus, portraits, paysages ou encore croquis, sa passion pour le trait juste, réaliste et les personnages féminins avait été compilée dans l’ouvrage Carnets secrets 2004-2020, publié aux éditions Daniel Maghen. Dans un entretien accordé au Monde en 2020, le dessinateur considérait que sa passion pour le croquis était une «une addiction, qui m’est venue très tôt, vers l’âge de 10 ans».

Initialement inspiré de par le style de Jean-Claude Mézière (dessinateur de Valérian), André Juillard a adopté au fil des albums un dessin pus proche de la ligne clair, ce qui lui a souvent valu d’être considéré comme un héritier d’Hergé. Le dessinateur s’est également penché sur l’illustration de textes littéraires, comme Tandis que j’agonise de William Faulkner (1991, Futuropolis Gallimard) et a notamment créé diverses affiches ou sérigraphies. Apprécié des collectionneurs, il avait vu une de ses planches du Cahier bleu adjugée à plus de 80 000 euros en 2019 lors d’une vente aux enchères chez Christie’s à Paris.