«La baise était notre amie sauvage, le fondement de notre rêve civilisé» : cette première phrase à l’imparfait vous saute au visage, peinte en capitales tremblotantes sur une page d’ouverture qui pourrait difficilement être plus frontale : deux paluches et un visage masculin s’inscrivent en triangle autour d’un fessier écarté au beau milieu duquel bée, rose, offert – on ne vous fait pas un dessin. C’était il y a onze ans. Moolinex, figure incontournable du dessin-BD-bricolage alternatif, jetait au monde cette Question en une vingtaine de pages aussi brutalement poétiques que désespérées. Instantanés d’ébats sauvages et de moments d’abandon, de tendresse aussi, s’y succèdent en toile de fond de cette implacable mais toujours tremblotante voix off qui fait le récit d’une rupture, ou plutôt de la sidération d’une rupture. La question en question, jamais énoncée («Comment se peut-il que tout cela ne soit plus ?», ou tout simplement «Pourquoi ?»), suinte de chaque coït pour se dissoudre dans la solitude terne d’un nombril.

Bon, et elle alors ? Elle, il se trouve qu’elle est artiste aussi, autrice de BD, et c’est là que la chose se complexifie : un an plus tard, celle dont le corps nu représenté sous tous les angles offrait un support érotique (consenti ou non ?) aux tourments de l’autre, prend la parole à son tour. La Réponse d’Aurélie William Levaux à son ex-mari, publiée chez le même éditeur, prend un parti tout autre, pudique, naïf presque, discussion entre