A l’heure des célébrations des 80 ans de la victoire des Alliés, du rappel au devoir de mémoire d’une heure qui a vu l’humanité devenir étrangère à elle-même, Du pain blanc et du chocolat semble une bien petite chose. Une bande dessinée en noir et blanc, au crayon, qui n’ambitionne qu’à partager un épisode de l’histoire familiale de son auteur, Pascal Matthey. Pourtant, à sa manière, elle produit un effet comparable à la fresque documentaire The War, de Ken Burns et Lynn Novick, qui racontait la Seconde Guerre mondiale à travers le destin de quatre villes et leurs habitants : elle remet du familier dans un conflit mondial.
Du pain blanc… conte deux histoires en même temps. En images, Pierre Matthey dit la vie d’un garçon suisse de 10-12 ans qui, dans les années 80-90, s’en va en vacances chez ses grands-parents à Marl, haut lieu de la chimie en Rhénanie-du-Nord-Westphalie. Un récit dessiné sur lequel se superpose un texte qui, lui, rapporte la vie de ses grands-parents cinquante ans plus tôt.
Paysage mental
Par son dispositif, Pierre Matthey produit un objet déroutant, qui tente de dire la guerre sans en montrer une image. Hors de l’archive. Pour être plus précis, la superbe idée de ce livre tient à la manière dont il remplace une archive (documentaire et univoque) par une autre (personnelle et équivoque). La BD s’attache d’abord à la représentation de sou