Il est des livres qui sont davantage que de simples histoires. Des livres qui ouvrent des perspectives, qui révèlent des écritures. Moi ce que j’aime, c’est les monstres est de cette trempe-là. Une bande dessinée fleuve qui raconte, sous la forme d’un carnet intime, la vie d’une gamine de 10 ans dans un quartier pauvre et tumultueux de Chicago durant les années 60. Sauf que Karen rêve d’être un loup-garou. Et un détective. Avant qu’on n’ait eu le temps de comprendre ce qui se jouait, son enquête sur le «suicide» de sa voisine Anca donnait naissance à un livre dans le livre, rejouant, à une autre échelle et dans l’Allemagne de Weimar, la guerre à la différence, à l’étrangeté qui enflamme l’Amérique des droits civiques. Une histoire de la violence déguisée en hommage aux films de la Hammer, avec cette permanence de la figure de la foule en colère donnant la chasse aux monstres. Un livre aussi qui transforme l’histoire de l’art en refuge contre la laideur et l’intolérance. Avec ce premier livre, dont le tome 1 est paru en 2017 et fut prépublié par Libé, Emil Ferris surgissait avec un autre cadeau : un style unique, immédiatement abouti. Des pages scarifiées par des milliers de coups de Bic jusqu’à ce qu’émergent des tableaux d’un volume et d’une densité folle. Succès critique unanime, Moi ce que j’aime… a raflé tous les prix possibles. Et puis silence radio. Il aura fallu sept ans pour que ce second volume voie le jour. On savait l’autrice déjà au travail,
Interview
Emil Ferris : «Je me suis fait des amis en racontant des histoires de fantômes»
Article réservé aux abonnés
Autoportrait d'Emil Ferris, réalisé en août 2024. (Emil Ferris/Monsieur Toussaint Louverture)
par Marius Chapuis
publié le 10 août 2024 à 8h00
Dans la même rubrique