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Festival d’Angoulême : Anouk Ricard, grand prix 2025, boycotte la prochaine édition

Contestée, la société 9eArt+, qui gère la manifestation, serait en situation favorable pour se succéder à elle-même. L’autrice d’«Animan», récompensée en 2025, refuse la traditionnelle exposition honorifique qui devait se tenir l’an prochain.

Anouk Ricard lors de la remise du grand prix d'Angoulême 2025, le 29 janvier. (Eric Pollet/Hans Lucas. AFP)
ParMarie Klock
Journaliste - Culture
Publié le 14/10/2025 à 11h04

La colère n’en finit pas d’embraser le milieu de la bande dessinée. Anouk Ricard, qui remportait cette année le grand prix du festival d’Angoulême, a annoncé ce mardi matin sur ses réseaux sociaux qu’elle n’y participerait pas l’an prochain. Surtout, elle renonce à la grande exposition qui devait lui être consacrée dans le cadre du festival, comme c’est la tradition tous les ans pour le vainqueur de la récompense considérée comme la plus prestigieuse de la profession. Ce boycott fait suite à l’enquête publiée par l’Humanité à la veille de la 51e édition, et qui mettaient la lumière non seulement sur la dérive mercantile de l’événement mais aussi sur le management toxique au sein de la société 9eArt+ qui gère le festival et de son délégué général, Franck Bondoux. Burn-outs à répétition, instabilité de la direction artistique, sans parler de la gestion alarmante d’un cas de viol au sein de la société, la victime ayant été licenciée après avoir porté plainte contre son collègue.

En avril déjà, 400 auteurs appelaient dans une pétition à «déserter Angoulême» si un changement drastique n’avait pas lieu. Cet automne, l’association du Festival international de la bande dessinée doit nommer la structure qui reprendra la gérance à partir de 2028 et pour les neuf années qui suivront. Selon une information de l’Humanité dévoilée lundi 13 octobre, la société 9eArt+ serait donnée favorite pour se succéder à elle-même ; en conséquence de quoi, plusieurs syndicats et organisations d’auteurs (STAA CNT-SO, #MeToo BD, Snap CGT…) publient une nouvelle tribune pour demander des engagements concrets pour un festival sûr et inclusif de la part du prochain prestataire. C’est dans ce sillage que surgit le coup de gueule d’Anouk Ricard.

Sous les traits d’un adorable petit chien à lunettes vêtu d’un tee-shirt à cœur, l’autrice envoie ce calme missile, de sa plus belle écriture cursive : «Etre élue grand prix d’Angoulême 2025 par mes pair·es, les auteur·ices de bandes dessinées est un immense honneur. C’est la plus belle des reconnaissances pour moi. Mais… dans le contexte actuel, autour de l’organisation du festival, j’ai pris la décision de ne pas participer à l’édition 2026, ni à l’exposition qui devait m’être consacrée. C’est un choix personnel, réfléchi, en accord avec mes convictions et en soutien aux voix qui demandent un changement nécessaire et qui appellent au boycott. Pour un festival plus respectueux et à l’écoute de toutes les voix. J’espère que cette décision sera comprise pour ce qu’elle est : un geste de cohérence, de solidarité et non de rejet de la bande dessinée ou de son public. Je ne m’exprimerai pas davantage dans les médias sur ce sujet, je souhaite continuer à créer à mon rythme et à ma place.»