Dénudé, le dos courbé, regardant en arrière, il évoque un penseur de Rodin mélancolique. L’homme est assis sur un vieux pneu. Son regard traduit toute la tristesse du monde. Il est dans une décharge un peu à l’écart de la ville et il se demande si sa vie ne ressemble pas un peu à ça : des détritus dont il ne saurait que faire et dont il est bien incapable de créer un ensemble cohérent.
Samar, double de l’auteur Joseph Kai, a 30 ans. Il est dessinateur, Libanais, et vit à Beyrouth. Dans la capitale, il défile presque chaque jour contre la corruption tout en essayant de vivre au mieux son homosexualité dans un pays où les personnes LGBTQIA + sont réprimées, mais où il existe parfois, encore, des espaces de liberté. Qui sont souvent menacés : un soir, avec une amie, le héros assiste à une performance d’une artiste en transition, qui se met nue sur scène. La police intervient, elle l’embarque. Elle n’est libérée que parce qu’elle appartient à une famille riche qui peut payer une importante caution. «Tu te rends compte que le pouvoir ne fait que ça pour détourner notre attention de tous les autres problèmes qui gangrènent le pays ?», analysent Samar et ses amis, se réfugiant dans un bar. Ils se demandent, en même temps, si ce n’était pas trop provocant, trop explicite, surtout ici.
Quand Beyrouth souffre, il souffre
Lorsque Joseph Kai dessine cette BD, le Liban va