Une porte s’ouvre. Will et Connie rentrent crispés d’un trajet interminable. Ils se sont engueulés. La colère est passée et chacun fait des efforts pour être doux envers l’autre. Coup de fil à la famille. Le chien de la mère de Will est mort. Aux amis. Le frère du coloc de Tim aussi… «Jamais deux sans trois», dit Will, avec trop de sérieux pour que ça soit complètement une blague. Tout le propos du livre de l’Américain Jordan Crane est dans cette petite phrase et dans le titre. Keeping Two, c’est à la fois faire en sorte que l’on s’en tienne à ce bilan de deux morts et que l’on reste tous les deux. L’évier est plein, les placards vides. Will, dont on devine un accès de flemme, propose de s’atteler à la vaisselle pendant qu’elle s’occupe de faire des courses. OK, mais toute la vaisselle.
Précedent opus
Immense bazar contrôlé
Chacun se met donc à la tâche. Tandis que les mains de Will s’agitent sur les assiettes, son esprit vagabonde. On est dans les embouteillages. Quelques heures plus tôt. Il conduit, elle lit à voix haute. L’histoire de Claire et Daniel. Il accepte un nouveau job, loin, alors qu’elle est enceinte. Il y a des complications. Will casse une assiette. Dan n’est pas là, le bébé meurt à la naissance. Will manque de percuter une voiture et se fait engueuler par Connie.
Derrière l’apparente simplicité du livre, porté par une ligne sobre et propre, un découpage d’une imperturbable régularité en six cases, et le duo de verts éclatant des pages, Keeping Two révèle alors sa nature profon