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«L’Oubliée» de Benoît Preteseille, brol de dame

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A travers un récit à tiroirs bien ficelé, l’auteur se plonge dans la vie d’une ancienne archéologue à la carrière prolifique qui vit désormais retirée au milieu d’innombrables bibelots.
«L'Oubliée» de Benoît Preteseille raconte une histoire d’absence, de vide. (Editions Atrabile)
publié le 28 avril 2024 à 5h31

Dans notre exemplaire de l’Oubliée, on retrouve, utilisé comme un marque-page, le ticket repas résiduel d’un festival qui n’existe plus. Valeur marchande de ce bout de carton : à peu près nulle. Mais jamais on ne le jettera, et cet indécrottable penchant pour la conservation des supports à histoires est caressé dans le sens du poil par l’héroïne du dernier livre de Benoît Preteseille, une archéologue, autrefois «référence incontournable» de sa profession. Retombée dans l’anonymat, elle passe ses vieux jours au calme, dans un coin paumé où la croise par hasard le narrateur, qui décide de l’interviewer. Et c’est à travers ses bibelots – elle-même les qualifie affectueusement de «cochonneries» – qu’on entre dans la vie de cette fascinante vieille dame, à commencer par un petit crapaud en grès émaillé signé Jean Carriès et qui cohabite sans hiérarchie avec un obus sculpté, un bouquet sec, des billes, un pantin amputé d’un bras et toutes sortes de merdouilles (en Belgique, on appelle ça le «brol») qui, ici, sont toutes affectueusement qualifiées d’«œuvres» puisqu’elles ont en commun d’avoir été façonnées par la main humaine. Pour cette archéologue passionnée de «bouts de trucs», n’importe quel caillou peut se révéler être un fragment de quelque chose quand on sait le regarder. Elle raconte une existence en rébus, des morceaux qui ne trouveront jamais leur place et qu’elle réagence en édifices précaires, d’autres qui lui donnent des idées d’inventions, et c’es