De l’exercice solitaire et claustrophobe du dessin, Kim Jung-gi a tiré une pratique presque nouvelle, un exercice de prestidigitation. Plutôt que de s’enfermer dans un studio ou un appartement pour dessiner dans son coin, créer des bandes dessinées comme les autres (enfin pas tout à fait comme les autres, vu son niveau de virtuosité), le Coréen s’y adonnait en public, devant des foules larges et toujours envoûtées. La référence aux spectacles de magie est choisie à dessein tant ses «drawing shows» exerçaient le même pouvoir de fascination nourrie d’incompréhension. Comment un type muni d’un simple pinceau pouvait s’installer devant une longue toile blanche et la transformer en fresque cyberpunk, dense et frappadingue, sans le moindre crayonné, presque sans intention ? Comme si cette main droite était devenue si habile qu’elle pouvait se passer de tout guide, laissant les formes advenir d’elles-mêmes, dans une poésie où chaque ligne en convoquait une autre. Sous ses doigts légers, un angle pas tout à fait droit se change en pare-brise, avant de révéler une voiture désossée sur laquelle s’affairent des mécanos, eux-mêmes perdus dans une foule sur le point d’entamer une grande migration collective sur une feuille de plusieurs mètres de long. Le dessin transformé en spectacle, en communion autour d’un artiste sans filet.
Une renommée internationale malgré lui
Le truc le plus dingue étant qu’il n’y a pas de truc. Pas de truc dissimulé en coul